A?N REGADA (GUELMA) / Quand les terres publiques sont céréalières
AÏN REGADA (GUELMA) / Quand les terres publiques sont céréalières
On l’appelait la petite Constantine au temps du colonialisme, non pas parce que le bourg en question lui ressemblait, mais pour la fébrile activité des ruches qui s’y déroulait. On parlait ainsi de Aïn Regada, non pas par nostalgie, mais pour rappeler le proverbe disant : «Quand on veut on peut». De fait, il était le siège social de la Compagnie algérienne de la promotion et de l’exploitation rurale (CAPER), qui exploitait toutes les terres céréalières s’étendant de Sedrata à Bounouara, soit une superficie de 75 000 ha, sinon plus, selon les propos des vieux.
Aïn Regada garde encore les vestiges d’une infrastructure agricole colossale, plusieurs ateliers, la forge, la menuiserie, les bassins de l’eau distillée pour les batteries, ceux pour le recyclage des huiles, les ateliers de réparation et de maintenance des machines agricoles, et bien d’autres hangars. Toute cela fonctionnait jusqu’à la fin des années 1970. Si tout cela a été laissé à l’abandon et à la déprédation, les villas cossues des colons, elles, qui bien entendu sont occupées aujourd’hui par des Algériens, restent toujours debout comme pour témoigner de ce qu’était cette région florissante. Mais ce qui frappe encore l’attention du visiteur, c’est le «douck», comme on dit ici, un groupe de silos à blé, une sorte de gigantesque bunker bâti en 1924 avec un mur de 80 cm et composé de plusieurs cellules et tous les équipements de chargement et de déchargement de blé, qui malheureusement ne fonctionnent plus depuis quelque temps à cause des petites vétilles. Il y avait aussi une station de traitement et de conditionnement de semences, et des rails pour le train pour le transfert des récoltes. Aujourd’hui, plus de station et pas l’ombre d’un train, seuls quelques vestiges en témoignent. La capacité totale de ce silo est de 170 000 q, mais on n’en utilise qu’une partie d’une capacité de 80 000 q, pour cause de délabrement avancé des autres cellules. De ce genre de grange géante, il paraît qu’il en existe deux en Algérie, à Aïn Regada et à Sidi Bel Abbès, nous dit-on. Aujourd’hui, après avoir perdu son «butin de guerre», cette infrastructure, qu’on aurait pu perfectionner avec le temps le silo peut faire facilement l’objet de réfection , la commune de Aïn Regada, si elle garde toujours sa vocation des grandes cultures, n’est pas loin aussi de perdre cette tradition de travailler ses terres avec autant de hargne. Faisant partie d’une région céréalière par excellence qui constitue l’un des plus importants greniers du pays et qui comprend Oued Zenati, Aïn Abid, Bordj Sabath, et Tamlouka, la commune de Aïn Regada a une superficie agricole globale de 11 562 ha, dont 11 381 ha de terres publiques et 181 ha de terres privées et une SAU de 6650 ha, dont 171 de terres privées. Le nombre de fellahs est de 332. En moyenne, et annuellement, la superficie emblavée en céréales s’élève à 5000 ha. C’est une commune qui a sa place dans la wilaya de Guelma en matière de production céréalière avec en moyenne 30 000 q quand c’est une bonne année. Seulement voilà, les terres publiques qui sont réparties entre 32 EAC et 109 EAI ne sont pas toutes travaillées comme il se doit. On nous apprend que les terres de la plupart des EAC sont départagées entre les fellahs, ce qui est contraire à la loi, et ainsi les EAC trouvent des difficultés à ouvrir droit aux avantages du PNDA. Autre infraction à la loi : plus de 50 % des terres publiques sont données en location. La première année du lancement du PNDA, sur les 32 EAC, seules cinq ont bénéficié des avantages de ce plan, parce que les autres sont dans une situation irrégulière. Par contre 45 EAI en ont profité. La deuxième année, soit cette saison, c’est la constitution du dossier, véritable parcours du combattant, qui a entravé la bonne marche de la campagne agricole, nous dit-on. Beaucoup de fellahs demandent qu’on le simplifie. Déjà les frais qui en découlent sont énormes. Durant cette camagne, beaucoup de fellahs ont eu les semences à la fin de décembre 2002 et au début de janvier 2003 à cause du retard dans la constitution du dossier aussi, beaucoup se demandent pourquoi ne pas instruire au niveau du comité technique les dossiers au mois de juin afin que les fellahs reçoivent la semence à temps ? Bien sûr, la commune a d’autres problèmes, le chômage entre autres. On compte une cinquantaine de cadres chômeurs. Malgré les quotas dont elle a bénéficié en matière de filet social, AFS et emploi de jeunes, le nombre de demandeurs d’un «job» et les besoins de la commune restent importants.